Le temps passe étrangement. Très étrangement. Il flotte dans mon air ambiant un sentiment ambigu qui s’est confirmé hier soir au cours d’une soirée aussi atypique que logique, autant paradoxal cela puisse-t’il paraitre.
Nous étions réunis, comme à notre habitude, joyeuse confrérie de la francophonie alternative, régulièrement chamboulée par des arrivées et des départs. Ce sont maintenant deux nouvelles demoiselles qui se joignent à nos beuveries fêtes de fin de semaine. Anna, jeune germanophile marchant sur les traces de Mélanie et Pauline, jeunes filles au pair de leur état.
Mais je disgresse encore et toujours, vieux tic d’écriture. Je disais donc que nous étions réunis au Goldrush, notre QG et que nous buvions nos éternels pitchers de Yukon Red et Gold. Tout le monde parlait, rigolait, ricanant et cancannant, eructant bruyament et sans se cacher.
Et au milieu de tout ça, il y avait moi. Sans parler, sans même écouter, j’ai pris conscience de la chance vitale, insensée, profonde que j’avais d’être la, de vivre ce que je vis, entouré par une peuplade bizarre à qui je voue un respect extrême. D’un Nicolas à une Pascale, d’une Alexandra en madeleine-like à une Virginie colloc’ historique, je me suis projeté dans mon passé, de retour six mois en arrière, Pvtiste fraichement débarqué et sans repères.
Et au fur et à mesure de la soirée, je me suis doucement rendu compte que bien des choses touchaient à leur fin. Avec la fin de l’été, l’arrivée – quoique lointaine – du rude hiver yukonnais, des départs des êtres déjà chers…
La vie, ma vie, défile et se bouleverse à toute vitesse.
Passé de l’Alaska au bush sans transitions, de retour à Whitehorse sans vraiment pouvoir faire autrement, cherchant à m’en échapper mais voulant en profiter !
Je me suis d’ores et déjà arrangé pour me mettre au pied du mur mi-septembre. Ma chambre sera vide et disponible pour son nouvel occupant, Nicolas F. Mes valises seront faites et probablement prêtes à être chargées dans « mon » van que j’aurais acheté avec l’argent de la bucheronnerie. Et ce sera le début d’une nouvelle aventure, direction la Californie et les grands espaces américains.
Je sais bien que ce post fait un peu éloge funèbre, écriture rhumatismique au mode passé mais pourtant j’essaie de traduire le léger goût d’amertume qui se trouve sur mes lèvres à cet instant.
Le début de la fin, le début de ma faim !