J’aurais aimé ne pas naitre parisien

Connaissez-vous ce sentiment de perpétuel émerveillement, quand vous repassez pour la xx² millionième fois devant un lieu que vous aimez, que vous adorez, que vous chérissez ? Connaissez-vous cette impression d’un bonheur aussi fugace que profond, ancré là, quelque part ? Connaissez-vous cela, l’avez-vous déjà ressenti ? Moi, chaque jour que Dieu le Grand Castor fait, je le ressens, quand je marche dans Paris et que j’arrive sempiternellement aux mêmes endroits, aux mêmes lieux, que j’arpente encore et toujours les mêmes trottoirs et les mêmes rues et que, ravi, je soupire d’aise et de béatitude, je ne peux m’empêcher de me dire une chose :

J’aurais aimé, des fois, ne pas naitre Parisien !

Vous savez (ou ne savez pas) que j’entretiens une relation bien particulière avec cette ville que je chéris autant que je hais. A mon retour du Canada, j’étais épouvanté d’y vivre : la transition entre le pays des aurores boréales et cette capitale enfumée fut aussi traumatique que compliquée et les seules paroles qui sortaient de ma bouche étaient “ville de merde, pays de merde”. Quand je suis parti vers les Alpes puis la Nouvelle-Zélande, je n’ai eu aucun remord particulier, aucune tristesse spéciale. Je laissais derrière moi des bribes de vie, des instantanés du passé, des éclats de rire et des larmes de tristesse. Mon troisième (et probablement dernier) retour d’expatriation fut différent : attendu, choisi, déterminé. J’étais satisfait de retrouver ma ville et de revoir certaines personnes, certains lieux, certains contextes. Pour autant, ce retour m’a laissé un gout un petit peu amer : celui de ne pas pouvoir découvrir Paris par les yeux d’un touriste.

Tour eiffel

Pendant ces premières semaines de ré-accoutumance à la vie capitale, j’ai passé mon temps à marcher, marcher et encore marcher. Je zappais – à dessein – les transports en commun pour ne privilégier que la marche. En battant le pavé, je cherchais à me réapproprier cet espace urbain, à le faire mien, à le posséder de nouveau. Sans but spécial, mes errances m’emmenaient d’un bout à l’autre des arrondissements, par des voies détournées, tortueuses, inconnues, seul ou entouré d’un flot monumental de touristes.

Le canal saint Martin

En revisitant ces lieux, un double sentiment m’habitait, paradoxal et ambigu. D’un côté, j’étais heureux de revoir ces monument aussi fameux qu’iconiques. J’étais content de retrouver ces atmosphères dans lesquelles j’ai grandi pendant les premières décennies de mon existence. Cependant, et d’autre part, j’étais jaloux de tous ces gens, de toutes ces personnes qui vivaient leur première fois parisienne et qui pouvaient, à juste titre, s’émerveiller devant des monuments si communs, si connus, si banals pour moi…

Notre Dame

Alors, dans ces moments de jalousie, je deviens mauvais et subjectif. Je ricane vertement devant les troupeaux, je me gausse des styles vestimentaires d’autrui et je louche avec envie devant les gros objectifs photographiques de nos amis d’outre-Mongolie. Cependant, au fond de moi, je n’ai qu’une seule envie : être comme eux, pour une fois, un touriste absolu dans ma ville. Je voudrais pouvoir sauter de joie devant la Tour Eiffel, comme cette famille australienne rencontrée dans le métro. Je voudrais pouvoir ouvrir de grands yeux devant les Champs Élysées en hiver, comme mes amis chiliens. Je voudrais m’immerger dans les folles nuits du Quartier Latin, me perdre dans les couloirs du Louvre et admirer Paris depuis Montmartre, comme tant d’autres…

Panorama

Heureusement, cela ne dure pas et je réalise – quand même – la chance que j’ai d’être né ici et d’avoir grandi au sein de notre (belle) Capitale. Toujours et encore, envers et malgré tout, Paris continue à me surprendre, presque malgré moi. Même des paysages vus et revus arrivent à changer. Même des monuments et emplacements dix mille fois visités persistent à m’étonner. Les parisiens, eux-mêmes, continuent à m’interpeller, pour le meilleur, le pire et le rire.

Double rainbow

Alors, désormais, quand je rencontre des touristes venus découvrir Paris, que ce soit dans des auberges, des locations de type Housetrip ou encore plus simplement dans des modes de logements alternatifs, j’essaie à chaque fois, avec mes mots (et mes maux) de leur expliquer la Chance qu’ils ont de venir découvrir Paris et le bonheur que la Ville va leur apporter. J’essaie également de leur expliquer, avec mes mots, que j’aimerais tellement être à leur place, voir les choses par les yeux, ressentir par leur cœur, avec eux, en eux…

Amour parisien

Finalement, et après tout ce temps, j’ai accepté l’idée que, sauf accident majeur, que je ne serais jamais un inconnu chez moi. Alors, je fais avec et je vis (malgré tout). Cependant, je ne peux m’empêcher de me dire, quand même : j’aurais aimé, des fois, ne pas naitre parisien !

Tour eiffel

Et vous dans tout ça ?
Des regrets, des envies ?
Avez-vous déjà ressenti ce que j’évoque dans ce billet ?

  1. Très joli article, je comprends ton ressenti. Sans être moi-même parisien, n’y ayant jamais vécu, mais ayant parcouru la capitale lors de mes années étudiantes, en large, en long, et en travers, connaissant d’ailleurs mieux ses petites rues que la plupart des parisiens incapables de se diriger hors de leur arrondissement, voir de leurs rue, j’ai aussi toujours cette envie de quitter cette ville, et aller m’installer ailleurs, à Stockholm par exemple (par exemple, au hasard). Avoir cet émerveillement à chaque coin de rue que je peux avoir lors de mes fugaces visites dans ma capitale suédoise. Cependant, je pense aussi que la lassitude arriverait ensuite. Pour Paris, je m’y balade souvent le midi, et c’est vrai que quand on à le temps de s’y promener, sans but précis, c’est une ville magnifique. Il faut vraiment sortir de ce métro/boulot/dodo pour la regarder autrement, et ce n’est pas simple…oui, parfois il doit être bien de la redécouvrir, ne l’avoir jamais connue, et y débarquer en tant que simple touriste !

  2. Coucou Cédric

    c’est marrant car j’ai eu un sentiment similaire en découvrant Rome pour la première fois il y a quelques jours. Je me suis dit “je suis heureuse de découvrir cette beauté avec mes yeux, et après avoir bien voyagé ailleurs”. Et du coup, j’imagine que la surprise aurait pu être la même si j’avais découvert Paris à 30 ans…
    Ton texte est beau mon cher 🙂

    A bientôt,
    Aurélie

  3. oui, je suis d’accord avec toi, j’aime toujours ma champagne-ardennes mais j’aime Paris, je m’y sens bien je ne fais pas plus de commentaires, et la rue des thermophylles, je la connais bien, quand vous étiez petits,, je la prenais pour aller au parc, rue boyer-barret

  4. Ville de merde qualité de vie population pollution coût météo transports ville de merde vous pouvez vous autoconvaincre du contraire quand ça as le goût de la merde la couleur de la merde et l odeur de la merde il faut s y résoudre c est de la merde :))))))

  5. J’ai la chance d’être parisienne… mais d’avoir quitté la ville plusieurs fois, pour plusieurs années. Ce moment au retour où j’étais saisie à nouveau par la beauté indescriptible de cette ville, je l’ai encore dans la rétine. Et je cultive l’émerveillement le plus possible, pour ne jamais banaliser. Même si je reconnais que ce n’est pas simple. Parfois c’est mieux d’être Australien pour sauter devant la Tour Eiffel 😉 Merci pour cet article & pour ce chouette blog.

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Le bord de mer à Fort-Mahon