Alors que se fait attendre l’ouverture des Permis Vacances Travail (cuvée 2014) à destination du Canada, jamais la couverture médiatique n’a jamais été aussi présente, lourde et oppressante. Bien peu sont les journaux qui résistent à l’envie de titrer « Tous au Canada », « L’exil d’une jeunesse désenchantée », « Les PVT, passeports pour l’Eldorado » et autres annonces aussi accrocheuses que racoleuses. Si, vers le début, je suivais cela d’un œil amusé et un poil ironique, je commence désormais à être légèrement catastrophé par les quantités abyssales de stupidités que je peux lire de ci et de la, que ce soit dans un journal à tirage national, dans une vidéo sur un site d’information ou même au détour de Twitter. Je vous propose donc, en ce lundi 27 janvier 2014, une petite mise au point de ce qui est vrai – ou non – dans la jungle médiatique actuelle !
PVT 2014: mensonges et vérités
Je ne vais m’amuser ici à recenser tous les articles parlant du PVT et du Canada. Une simple petite recherche sur Google ou encore sur Twitter, via les hashtags appropriés (#PVT, #EICFrance et autres #PVTCanada2014) vous sera beaucoup utile et agréable. Sachez cependant que tout ce qui suit n’est pas le fruit de mon imagination et a vraiment été écrit/dit/lu/discuté/affirmé.
« Alors que l’Ambassade devrait ouvrir prochainement les PVT »
Soyons clairs: tout média qui affirme cela ne sait absolument pas de quoi il parle. Nul ne peut dire, à l’heure qu’il est, quelle sera la date exacte d’ouverture des sésames et cela constitue probablement le secret le mieux gardé au monde (en exagérant juste un peu). Cependant, comme cela constitue un exercice facile et peu risqué d’affirmer un truc au final très évident (car oui, ils vont forcement ouvrir un jour), tout le monde y va à sa manière, parlant d’une source, d’une impression, d’une normalité ou des années précédentes. Ne croyez donc rien de tout ça et rappelez-vous que le seul endroit où l’information sera délivrée est sur la page officielle d’EIC, entre 24 et 72 heures avant l’ouverture effective ! Pour mettre toutes les chances de votre côté, oubliez définitivement l’alerte mail et mettez-vous sur Twitter pour suivre @AmbCan, le compte officiel de l’Ambassade, tout en n’oubliant de vous inscrire aux différentes alertes SMS (dont celle de PVTistes.net, bien sur !).
« Les Permis Vacances Travail pour le Québec… »
Je ne sais pas ce qui se passe dans la tête des journalistes français mais je n’ai jamais vu une telle accumulation d’amalgames entre le Canada et le Québec, le summum ayant été atteint par un article catastrophique du Parisien, sobrement intitulé « Jeune plein d’avenir cherche contrat au Canada » et dont l’introduction m’a laissé béat: Le Québec va ouvrir dans quelques jours les inscriptions permettant à 6 450 Français de travailler ou de visiter le pays pendant un an. » suivi d’un tout aussi fabuleux « Les 6 450 permis vacances travail pour le Québec devraient être émis dans la semaine par l’ambassade du Canada. Preuve de l’engouement pour une expatriation dans la Belle Province, ce quota pourrait être épuisé en un quart d’heure. »
Notez ici que l’auteure réussit le tour de force de tout mélanger, d’assimiler le Canada au Québec et de croire que les PVT sont une spécialité québécoise. L’échange que nous avons eu à ce propos sur Twitter (et que je vous laisse le soin de retrouver) m’a laissé un petit arrière-goût étrange et l’impression d’un travail fait à moitié, alors que nous parlons d’une pleine page dans un quotidien à tirage national.
Sachez donc, ô messieurs et mesdames, que le PVT n’est pas une spécialité québécoise, qu’il est émis par l’Ambassade du Canada et valable sur l’ensemble du territoire national canadien.
60 000 français pour 6750 places…
Spéculation, évaluation, grossissement volontaire ? Il n’existe, à ma connaissance, aucun chiffre officiel du nombre de personnes candidatant à un permis vacance travail. Les seules sources sur lesquelles on pourrait éventuellement se baser sont le fruit de recherches internes, de mise à contribution des utilisateurs (sondage sur un site par exemple) et rien de plus. Strictement rien de plus. Certains pourront vous dire que le nombre de followers du compte Twitter de l’Ambassade, additionné au nombre de personnes ayant souscrit à une alerte mail et/ou sms peut constituer un chiffre acceptable.
Or, cela est faux ! D’une part parce que ces chiffres ne sont pas diffusés et, surtout, parce que toutes les personnes précitées ne sont pas forcement intéressées par le PVT. En effet, EIC propose 4 types de permis différents dont le PVT fait partie, au même titre que le JP ou le Job d’été.
Arrêtons donc de citer n’importe quoi et repartons sur des bases saines…
Le PVT, un moyen parfait pour l’immigration
J’ai déjà beaucoup écrit sur ce sujet (à lire ici ou encore là) mais je sors de mes gonds à chaque fois que je vois ce permis béni être présenté comme une porte ouverte vers l’immigration, québécoise de préférence. Transformer le but premier du PVT, – à savoir un permis ouvert d’un an à faire ce qu’on veut – en accessit pour la RP (résidence permanente), c’est tout simplement le tuer, l’assassiner et renier toute ce qui fait la beauté de son concept.
Le PVT est beau et grand parce qu’il est synonyme de voyage, de départ, d’aventure. Il n’existe que par sa durée de vie limitée (un an), son unicité (une fois et une seule par pays) et par la liberté qu’il contient de façon intrinsèque. Or, quand j’entends certaines personnes dans certaines vidéos, oser dire (à partir de 6’30 dans la vidéo) « qu’un PVT sans projet, c’est un PVT qui va partir en vrille alors que d’autres personnes, elles avec un projet, n’ont pas pu l’avoir et que c’est dommage qu’il en soit ainsi » (oui, j’ai un peu retranscrit à ma façon), je ne peux me retenir d’hurler, d’apostropher, de gémir, de jurer et d’avoir des envies de fuite nappées d’une incrédulité certaine.
Comment peut-on affirmer pareille stupidité ? Comment peut-on asséner, l’air aussi serein que possible, une immondicité pareille ? Comment peut-on dénier au PVT sa plus belle liberté et jeter ainsi l’opprobre sur des générations entières de voyageurs étant partis pour le plaisir, sans idées, sans projets, sans avenir québécois tout tracé ?
Si l’on voulait le saborder, je crois qu’on ne pourrait guère mieux faire…
En conclusion
Je suis attristé, vraiment, par la couverture médiatique qui est faite à propos de cette ouverture. Nul part ou presque, ai-je pu lire ou entendre des témoignages autres que ceux de français installés en la Belle Province. Le reste du Canada semble être une Terra Incognita, sauvage et anglophone et où la jeunesse française ne veut pas aller (vu qu’elle se dirige sur Montréal, forcement). Il est certain que les quotas vont s’épuiser à une vitesse record. Il est certain aussi que beaucoup vont rester sur le carreau. Il est certain, de même que l’attrait pour le Canada va probablement encore monter en flèche prochainement et que de nombreux sujets aussi laudateurs que dithyrambiques verront le jour.
Cependant, ce qui est également certain, c’est qu‘écrire sur du vide et spéculer sur du vent, propager des informations erronées et vendre du rêve lobbylisé, c’est la façon la plus sure de se décrédibiliser… en beauté et en vitesse !