Cela faisait bien longtemps que je n’avais pas réalisé, dans le cadre de ma série « Paroles de… », l’interview d’un blogueur francophone que j’apprécie. Or, cela fait également quelques temps que je suis attentivement les Aventures d’une blogueuse expatriée en Californie, anciennement indienne et voyageuse devant l’Éternel. Elle s’est très gentiment pliée, avec célérité et efficacité, au jeu des questions-réponses, nous parle de ses expériences, du voyage en solitaire et de son ressenti plus global.
J’ai donc le plaisir, pour ce huitième volume, d’accueillir Joana de Veni Vidi Voyage !
Paroles de Veni Vidi Voyage
La présentation
Première question, un classique: mais qui es-tu ?
Salut !
Je m’appelle Joana et j’ai 23 ans. Je ne sais pas trop quoi répondre à cette question à part que j’aime vivre au jour le jour (et parfois un peu trop dans le passé) et que mes meilleurs décisions a ce jour ont toujours été les plus folles que j’ai prises !
L’expatriation en Inde
Alors c’est sur que c’est dépaysant, il faut faire une croix sur son petit confort quotidien (pas d’eau chaude pendant 1 an, par exemple) et surtout accepter de changer sa façon de vivre.
J’ai cru lire que tu as passé un an en Inde. Ma question donc: pourquoi ?
Dans le cadre de mes études, je devais passer ma troisième année a l’étranger. Cela m’a pris beaucoup, beaucoup de temps mais je me suis finalement décidée a la dernière minute pour l’Inde. Je ne sais pas trop pourquoi. Sans doute l’attrait de l’ailleurs, un défi personnel, je voulais me prouver que je pouvais le faire, et puis surtout, un an d’étude en Inde c’était la certitude de ne pas beaucoup étudier mais de passer beaucoup de temps à voyager ! Cette année en Inde a été mémorable dans tous les sens du terme et des que j’ai quitte ce pays je n’ai eu qu’une envie : y revenir. Du coup, j’y suis retournée 4 mois pour mon stage de fin de master, 1 an et demi plus tard.
As-tu connu un réel choc culturel en allant habiter dans un pays que je suppose loin de nos standards européens (niveau de vie, pauvreté…) ?
En y repensant maintenant, je pense que la chance que j’ai eu c’est de ne pas avoir vraiment eu le temps d’y penser et de lire des tonnes de trucs sur l’Inde avant de m’y rendre. Du coup je suis arrivée la bas sans a priori et j’ai juste pris les choses comme elles venaient. Je pense que cela m’a évité de créer une espèce de méfiance ou de parano qui n’a aucune raison d’exister mais qu’on peut très facilement construire malgré soi en lisant les tonnes de récits négatifs sur l’Inde qui trainent sur le net.
Alors c’est sur que c’est dépaysant, il faut faire une croix sur son petit confort quotidien (pas d’eau chaude pendant 1 an, par exemple) et surtout accepter de changer sa façon de vivre. On ne peut pas se rendre en Inde avec ses gros sabots en se disant qu’après tout, c’est aux indiens de s’adapter à notre mode de vie occidental – on est chez eux et c’est a nous de nous adapter. Je suis a 100% pour le relativisme culturel et ce qui ne sont pas prêts a faire des efforts et à accepter certaines choses qui nous paraissent inacceptables en France sont ceux qui subissent le plus gros choc.
A la lueur de l’actualité récente, il semble que le climat ne soit pas particulièrement au beau fixe pour les femmes. Qu’en dis-tu ?
La condition des femmes n’a jamais été bonne en Inde. Je pense que tu fais référence aux évènements de décembre dernier (déjà presque 1 an !) lorsqu’un jeune fille a été violée dans un bus de Delhi puis laissée pour morte dans la rue.
Je sais que ce que je vais dire semble horrible, mais ce genre de choses est ‘fréquent’ en Inde. La seule différence ici c’est que le cas a été médiatisé. Forcement l’attention internationale portée sur l’Inde à ce moment là fut très négative et je le regrette car ce sont ces évènements graveleux que les gens ont tendance a retenir ; mais je pense aussi qu’une telle médiatisation en Inde a permis à beaucoup d’indiens de prendre conscience de la condition de la femme dans leur propre pays et les mobilisations en faveur des droits des femmes ont été nombreuses (enfin, en tout cas dans les grandes villes. Pour le reste, c’est une bataille qui va se jouer sur des décennies et des décennies !)
Et pour une voyageuse solo ?
Pour les voyageuses solo, c’est complètement différent et je ne pense pas qu’elles font partie de la population féminine vulnérable en Inde.
En fait, si les conditions de la femme sont en règle générale mauvaises dans le pays, c’est parce que la société est très patriarche. Une des déviances peut donc mener a des violences, mais la conséquence la plus commune pour moi est que les femmes sont très couvées, protégées. J’ai voyage plusieurs fois en solo en Inde, et je n’ai jamais eu de problème. La plupart des gens que j’ai rencontres étaient très curieux, serviables et attentionnés. Ils ne vous lâchent pas tant qu’ils ne vous savent pas en sécurité ! Il faut simplement faire preuve de bon sens : respecter les codes vestimentaires locaux, éviter d’adresser la parole à un homme isole, ne pas soutenir le regard des hommes, ne pas sortir trop tard la nuit, etc.
En tant qu’expatriée, comment te situais-tu par rapport à la population locale ?
C’est la chose la plus difficile pour moi et franchement cela mène a des grosses frustrations. Personnellement, je ne m’expatrie pas dans un pays pour ne fréquenter que les expatries français (c’est vraiment un truc que je déteste), c’est juste hors de question. Cependant l’Inde est tellement à 1000 lieux de notre culture qu’il est très difficile de ne fréquenter que des indiens. Il faut réussir à trouver un équilibre entre sa vie d’expatrié et les conditions de vie de son pays d’accueil – mais c’est assez dur et on à vite fait d’avoir l’impression de mener une double vie !
Si tu devais présenter TON Inde à toi,, ce serait quoi (oui je sais, c’est vache) ?
Je suis d’avance désolée, mais mon Inde à moi ne se rencontre pas lors d’un voyage. C’est celle que l’on rencontre au fil des semaines, dans son quartier, lors de sa vie quotidienne. Le proprio qui nous ouvre progressivement ses portes, la dame du petit bouiboui qui nous invite pour un chai tous les jours, les mecs de l’épicerie qui nous invitent chez eux pour le petit déjeuner, le garçon du coin de la rue qui finalement nous offre son sourire après des semaines et des semaines a se croiser. C’est le quotidien, quoi ! Les gens sont tellement différents lorsqu’ils comprennent que vous êtes là pour longtemps, pour vivre parmi eux.
Les voyages
En général je pars en sachant ce que j’ai envie de voir, ce qui me donne une ‘trame’ mais ensuite toute la suite du voyage est improvisée.
Après cette année, tu es revenue en France. Comment s’est passé la réacclimatation ? Pas trop dure ?
SU-PER dure. Mes premiers mois de master ont juste été horribles. J’ai mis plus de 2 mois a trouver un appartement a Paris, je n’arrivais pas a me convaincre que reprendre mes études était la bonne décision, je voulais juste prendre le premier avion pour l’Inde, et puis surtout, j’avais une relation encore mal définie avec mon Californien… J’avais beaucoup de mal a retrouver ‘ma place’ à Paris, je me sentais très déconnectée après ce que j’avais vécu en Inde (ce qui est peut-être un peu prétentieux). Bref, pas top.
Finalement je n’ai jamais fait mon « deuil », mais on se fait une raison ! Et puis je savais que j’allais pouvoir retourner en Inde pour mon stage de fin de master.
Tu as ensuite pas mal bourlingué, du Maroc au Skri Lanka en passant par le Chili et la Turquie… Belle bougeotte ! Quand tu voyages comme ça, organises-tu tout à l’avance ou es-tu plus de la dernière minute ?
Totalement dernière minute ! En général je pars en sachant ce que j’ai envie de voir, ce qui me donne une ‘trame’ mais ensuite toute la suite du voyage est improvisée. Je ne réserve jamais, me pointe a la dernière minute a la gare routière… Et puis si ca ne marche pas je change juste mes plans ! Cela a toujours fonctionné pour moi et je pense d’ailleurs que c’est ce manque d’organisation qui permet a mes voyages d’être si géniaux 😉
Au fait, jusqu’à présent, c’est quoi ton coin préféré ?
… L’Inde évidemment (et particulièrement le Nord) !
Tes prochains projets ?
Je me donne encore un peu de temps en Californie mais j’aimerais beaucoup aller découvrir l’Afrique, et si cela peut être dans le cadre d’un boulot, ca serait vraiment top. Sinon dans l’immédiat, prochain projet : un road trip en baja California, au Mexique ! Et en rêve, un long, long voyage de plusieurs années autour du monde.
La Californie
La ville est très conviviale, il y a des tonnes de quartiers sympas, pleins de bars et de restaus supers, des jolis coins ou se promener.
Alors la Californian Way of life, ça donne quoi jusqu’à présent ?
C’était la grosse question, mois qui suis un peu ‘anti-americaine’ (avec tous les clichés que cela représente) ! Mais finalement j’y ai suivi mon Californien un peu les yeux fermés et… Cela me plait beaucoup. San Diego est une super ville et je suis ravie de découvrir que tous les américains ne sont pas des capitalistes en puissance !
La région est-elle vraiment Sea, Sex and Sun ?
Hmm… Pour le ‘sex’, perso je suis fidèle a mon Californien donc je n’ai pas trop pu expérimenter, mais d’après ce que j’entends, les américains ont tendance à être plutôt prude de ce côté là. Pour le ‘sea’… la mer est malheureusement bien trop froide pour moi : impossible de m’y baigner !! Par contre pour le cote ‘sun’, ça oui, et c’est bien agréable !
San Diego, tu peux nous présenter brièvement ?
Je suis allée à un comedy show il y a quelques semaines et l’un des comiques a présenté San Diego comme étant une grande ville, mais avec l’âme d’une petite ville. Je suis tout a fait d’accord ! La ville est très conviviale, il y a des tonnes de quartiers sympas, pleins de bars et de restaus supers, des jolis coins ou se promener. Et le plus du plus, c’est la bière. Mais, rien à voir avec la France, hein. SD est apparemment la ville qui compte le plus de brasserie par personne au monde ! C’est une vraie culture, tous les bars proposent des dizaines et des dizaines de bières a la pression (et c’est pas cher !) et j’ai même des potes qui brassent leur propre bière dans leur garage.
SF, LA and co, c’est au programme ?
La maman du Californien habite a LA, du coup j’ai déjà eu l’occasion de m’y rendre. Par contre, ca n’a pas du tout été un coup de cœur pour moi… Je ne sais pas comment les gens font pour y vivre, mais la circulation est TOUT LE TEMPS bouchée (rien a voir avec les petits bouchons du perif’ Parisien), c’est juste infernal.SF oui, j’aimerais beaucoup ! Des que j’ai assez de sous pour payer le billet d’avion, je fonce !
Le blog
La condition pour continuer a bloguer, c’est de continuer a voyager.
Veni Vidi Voyage. En dehors d’être (forcement) une latiniste, pourquoi ce nom ?
Cela m’a pris des jours et des jours pour trouver un nom pas trop craignos pour mon blog. Finalement je ne sais plus trop comment j’ai fini avec ce nom là… Je pensais que tout le monde allait comprendre la référence, en fait, mais finalement pas tant que ça. Et je sais pas, je trouve que c’est un nom poétique, et puis ca va bien ensemble, non ? Je suis venue, j’ai vu… J’ai voyagé.
Quelle plate-forme utilises-tu ? Pourquoi donc ?
J’utilise wordpress, en partie par facilité (je ne connais(sais) rien en informatique et les tutoriaux que j’ai utilisés étaient basés sur wordpress) et aussi parce que maintenant je suis plutôt convaincue que c’est une plateforme géniale et facile a utiliser !
Quelle est ton approche du blogging (ligne éditoriale, contenu…) ?
J’ai eu d’autres blogs avant VVV mais c’était surtout pour raconter ma vie et/ou communiquer avec mes proches. Et franchement je m’épanchais vraiment beaucoup trop sur ma petite vie personnelle. Le défi avec VVV c’est de réussir à raconter mes voyages de façon personnelle, donner mon avis, être honnête, parfois même un peu drôle (enfin j’espère) mais sans que cela se transforme en journal intime !
La ligne éditoriale c’est de mettre l’accent non seulement sur les voyages, mais sur le concept de l’expatriation. Approfondir un lieu, en devenir familière, y mener ma petite vie quotidienne, ça, ça me plait ! Sinon, je suis désespérée tous les jours de me rendre compte que j’ai sauté plein d’étapes au moment de la création et que niveau référencement, c’est la cata !
J’aime beaucoup ton petit encart sur les liens sponsorisés. Pourquoi l’avoir signalé ?
Simplement dans un principe d’honnêteté. Et aussi, j’avoue, parce que je ne voulais pas mettre une ligne sur chaque article concerné spécifiant qu’il contient un lien sponsorisé. Du coup j’ai décidé de faire une annonce globale.
Tu as assez active sur les réseaux sociaux. Quel est ton préféré ?
J’utilise principalement facebook et twitter et je trouve qu’ils sont complètement différents, il n’y en a pas un que je préfère. J’utilise facebook pour rester en contact avec ma (petite) communauté composée principalement de gens qui n’ont pas de blog voyage mais qui sont tout simplement intéressés par le sujet ; et twitter c’est plus un moyen de communiquer avec la communauté blog voyage, justement.
Tu te vois bloguer encore longtemps ?
La condition pour continuer à bloguer, c’est de continuer à voyager ; alors j’espère oui, continuer à bloguer encore longtemps !
Le mot de la fin
Merci Cédric de m’avoir invité pour cet interview. J’espère ne pas avoir perdu trop de lecteurs en cours de route 😉
Mais encore merci à toi Joana ! Vous pouvez la retrouver donc sur son blog ainsi que sur ses diverses communautés: Facebook, Twitter ou encore Pinterest. Les photos illustrant cette interview sont bien entendue les fruits de son travail et une petite visite de par chez elle vous aidera à les resituer dans le contexte de ses voyages et expatriations.