Grand événement dans ma vie de Cedric exilé aux Antipodes: pouvoir assister à un match de Rugby après avoir, vu le prix du billet, vendu et/ou mis en gage la moitié de mon capital corporel.
Le lieu: Wellington Stadium (vu de dedans)
L’intro (qui sert à rien)
L’approche que j’ai du monde rugybstique est bourrée de clichés: je m’imagine volontiers de fiers et poilus gaillards s’envoyer des droites puis des bières, selon la mi-temps. J’imagine ces mêmes mecs venant du sud-ouest et voyagent en fredonnant en permanence quelques belles chansons propre à faire rougir Fanchon (ou ses copines).
De même, mon passé de spectateur n’est pas riche: un France-Italie en 6 nations au Stade de France ainsi que pas mal de visionnages de matchs dans ma beloved Taverne. C’est d’ailleurs dans ces circonstances que mon vocabulaire s’est enrichi de belles expressions typiques: aller à dame ou au charbon, mettre un tampon, un taquet, un caramel, pick and go, compter le décollage à rebours de ses dents, prendre le large, etc etc.
C’est donc (plus ou moins) en novice que je suis allé voir ce dernier match de la Poule X, quasiment décisif pour les quarts de finale, sous le doux patronage de Céline et Matthieu, l’une venant du Bearn et l’autre pas et maitrisant infiniment mieux que moi l’art du Supporter.
Il se trouve en effet que le supporter se rendant au stade se doit de porter une tenue adéquate, affichant pleinement ses préférences patriotiques. Dans notre cas, nous étions affublés de maquillages, perruques et même d’un Alien (qui commence à être connu de par ici d’ailleurs) prénommé Mister A.
Le Match
L’ambiance sur le chemin est carrément cool et détendue: les français gueulent, les tongiens gueulent et les locaux se marrent en nous regardant. On longe le Ouaterfront, on traverse la gare puis l’esplanade avant de gagner le stade et nos places attitrées.
Rien à voir ici avec les débordements inhérents à d’autres sports: aucune velléités aagressives dans les airs, ce ne sont que accolades, chants et gros calins de partout. Il faut croire qu’on est plus détendus aux alentours des Antipodes que dans notre bonne vieille Europe (à moins que ce ne soit le fait de voir des sélections nationales et non pas des clubs ? Peut-être moins de choses à défendre au prix de son sang…).
Toujours est-il que la sono crache de la variété française (On ira tous au Paradis) et tongienne (Shawahadahaha) en alternance pendant que les joueurs s’échauffent sur la pelouse et que les supporters, répartis sans distinction de nationalité dans les tribunes, s’échauffent la voix.
Le cérémonial suit son cours: tout le monde rentre au Vestiaire puis le Maori du jour se positionne à l’entrée du tunnel, souffle dans son espèce de trompette, tire la langue (aka J’fais la guerre) lorsque les équipes apparaissent. Icelles se positionnent sur le champ et attendent les Hymnes, entonnées par les choristes locaux. Pendant tout ce temps, le speaker nous fait gentiment savoir ce qu’il se passe et ce que nous devons faire, à base de « Please, stand up now for the national anthem » et autre blablas de circonstance.
Nous avons donc fièrement hurlé gueulé chantonné notre pacifique Marseillaise sous le silence respectueux de nos confrères océaniens, vu que nous avions fait de même pour eux auparavant et qu’aucun sifflet ne se fit entendre.
Vint alors le Grand Moment: celui où quinze mecs en colère font une chorégraphie à la mords-moi-le-noeud pour prouver à ceux d’en face qu’ils sont plus forts, mieux montés, bourrés de testostérone et que ça va viander sec dans les gencives dès le coup d’envoi: le Kailao-Sipi Tau
Puis, ça a été le carnage.
80 minutes à voir les Bleus se faire pourrir sur chaque ballon, chaque coup de pied, chaque mêlée tout en entendant des Let’s go Tonga autour de nous. On a bien essayé de donner la réplique mais la qualité du spectacle ne donnait vraiment pas envie de se détruire pour encourager. On s’est même demandé à plusieurs reprises si on assistait vraiment à un match de Coupe du Monde, tellement le niveau de jeu a été indigent et proche du néant.
Au coup de sifflet final, deux attitudes radicalement opposées (forcément !) malgré la similitude des équipes:
L’après-match
Une fois le coup de sifflet libérateur lâché, une douce folie s’est emparée des joueurs qui se sont rendus compte que l’exploit réalisé ce jour méritait un traitement particulier. Ça a donc été 45 minutes de communion pure entre une équipe et ses fans avec un Haka Hommage puis un long (et vrai) tour d’honneur avec moults photos, autographes et poignées de main et pas qu’aux locaux, bizarrement !
Et le Quinze de France ?
Rien ou presque. 3 ou 4 valeureux sont passés vite-fait lever les bras, tout en restant à bonne distance des tribunes, semblant ne pas avoir grand chose à faire des quelques 15 000 personnes venues les soutenir en dépit de leur faiblesse latente.
L’amorale
En fait, y en a deux:
- On a peut-être perdu ce match mais on a gagné la troisième mi-temps
- Comme je disais à une copine escroquée par son copain « Ton gars, il t’a bien eu ! »