Wanaka, le 29 janvier de l’an de grâce 2012
Encore une journée de voyage dans l’Otago, dans cette région qui me voit vadrouiller depuis maintenant 3 mois au travers des fermes et des auberges, sans savoir où mes pas me mènent.
Si le voyage aller fut une longue agonie, déjà contée de par ici, j’ai eu l’impression aujourd’hui que la main d’Hermes s’est posée sur moi, tellement ce fut facile et rapide de me faire embarquer par les véhicules.
Aurais-je dégagé un quelconque charme spécial ? Paraissais-je de bonne compagnie ? Fut-ce donc mon drapeau qui attira aussi bien l’attention que les intentions ? Ou bien était-ce la fête nationale des autostoppeurs, avec pour objectif pour chaque automobiliste d’en transporter quelques uns ?
Mon voyage a été inauguré par un Kiwi fort bavard puis par un couple de suisses, poursuivi par une famille avec ses deux enfants et enfin achevé par un charmant koweitien étudiant à Dunedin.
A chacun de ses lifts, je n’ai qu’à poser sur la voiture arrivant un regard venu du plus profond de mon âme, déchirant la carrosserie et atteignant le conducteur en plein coeur. Je semblais communiquer au-delà de l’enveloppe charnele, directement d’esprit à esprit, en mode Wifi cérébral.
Pour preuve, alors que je patientais depuis 3 minutes au large de Crownwell, j’ai décidé, en voyant un bolide arriver, que ce serait celui-ci qui me prendrait et non pas un autre.
Et que croyez-vous donc qu’il arriva ? Ce fut ce char qui s’arrêta !
Au-dessus de ces considérations métaphysiques, force m’est de constater que mon compréhension du patois local a enfin atteint le niveau souhaité, sans même que je m’en fusse rendu compte. A force de baigner dans un environnement uniquement anglophone, à force de tenter d’esquiver les coins trop francophones, mon anglais s’est affûté d’une façon fort remarquable, qui parvient même à m’attirer des compliments de la part des rudes travailleurs agricoles, pourtant peu porté sur la flatterie, surtout envers les français de voyage.
Il m’a été demandé de par ailleurs par un charmant Dal’ de passage, quelle pouvait bien être la signification de cet étrange drapeau érablé dont mon sac à dos se trouve affublé et si cela sous-entendait que je reniais quelque part mes chères racines hexagonales ?
Que nenni, que nenni !
Il faut savoir que la Nouvelle Zélande est le paradis du HitchHiking et que la demande est bien souvent plus élevée que l’offre.
Ainsi, pour me dégager des masses laborieuses et peu originales, j’ai eu l’idée un tantinet saugrenue d’accrocher sur mon dear backpack ce beau drapeau visible de loin, me démarquant ainsi des autres, des pas beaux, des poilus et des puants.
De plus, cela me donne des occasions de pratiquer un humour quelque peu douteux puisque, lorsqu’on me demande si je suis canadien, je ne trouve rien de mieux à répondre que « Non, je suis chinois » (ou autre nationalité dont la pensée me vient à l’esprit).
Ironie, ironie puisqu’avant d’être français, canadien ou même néozélandais, je ne suis que ce que je prétends être: un simple Cedric errant, citoyen du monde et habitant de la Terre !