Faire un circuit du souvenir sur les sites de mémoire de la Somme en famille, c’est un projet qui peut paraître un peu sombre, un peu triste, présentant peu d’intérêt. Aller d’un cimetière militaire à un mémorial en passant par deux ou trois musées, quel but ? Et pourtant, bien loin de tous les clichés, les sites de mémoire de 14-18 sont d’un intérêt touristique et patrimonial majeur ! Précieux témoins des combats et conflits d’hier pour les générations d’aujourd’hui, ils offrent la possibilité d’un voyage ludique, diversifié, généreux et plein de surprises. Alors, tiré de mon expérience samarienne et familiale depuis 2020, venez découvrir les sites de mémoire en famille, dans la Somme !
Découvrir les sites de mémoire dans la Somme en famille
L’idée est simple : vous proposer, à partir de mes propres voyages, explorations et découvertes, un itinéraire d’une journée au départ d’Amiens. J’ai choisi des sites où je suis allé en famille et que je sais pertinents, autant pour les plus jeunes que pour les parents et autres accompagnateurs.
Ce circuit se découpe en 8 étapes, faisant une boucle d’environ 110 kilomètres pour deux heures de conduite (hors arrêts). Il peut se réaliser dans un sens ou dans l’autre, être modifié à satiété et peut se décliner en version 100% gratuite.
Mon itinéraire suggéré !
Arrêt N°1 : les photos de Vignacourt
Un petit musée dans un petit village : mais qu’est-ce qui peut bien justifier un arrêt ici, aux portes d’Amiens ?
Et bien, le fait qu’on y trouve une incroyable collection de photos prises par le couple Louis et Antoinette Thuillier. Vignacourt était une importante base arrière, un lieu de retraite pour les soldats. Notre couple avait un appareil photo : vous devinez le reste !
Tombées dans l’oubli, les plaques photographiques n’ont été retrouvées que récemment. On peut en découvrir un certain nombre dans le Centre d’Interprétation Vignacourt 14-18. La visite est certes courte mais vraiment intéressante pour une première approche de la vie des soldats : visualiser, se projeter, mettre des noms sur des visages.
Etape N°2 : le Mémorial terre-neuvien de Beaumont-Hamel
Un caribou haut perché qui semble surveiller le champ de bataille sis à ses pieds : c’est par cette statue que sont accueillis les visiteurs du Mémorial terre-neuvien de Beaumont-Hamel, un incontournable absolu des sites de mémoire de la Somme.
Le site est exceptionnel à plus d’un titre : d’abord parce que, en s’y rendant, vous quittez la France pour arriver au Canada : les lieux sont en effet placés sous la tutelle de Parcs Canada, qui en a la responsabilité et l’entretien. Exceptionnel ensuite par ce que l’on y trouve : des portions de tranchées et des cratères d’obus laissés en état, qui témoignent pour de vrai de ce que fut ce champ de bataille bien précis (où fut quasiment anéanti le Régiment Royal de Terre-Neuve, durant la bataille de la Somme).
Exceptionnel enfin pour l’émotion qui prend aux tripes et étreint durant la totalité de la visite, à travers les cimetières et mémoriaux.
Etape N°3 : la Tour d’Ulster
Entre deux grands Mémoriaux, une petite tour qui se découpe dans le paysage samarien, étrange et intrigante. C’est la Tour d’Ulster, un petit morceau d’Irlande du Nord, dédié à la mémoire de la 36e division irlandaise (mais aussi à celle des tous les soldats des bataillons d’Ulster : Royal Irish Fusiliers, Royal Inniskilling Fusiliers, Royal Irish Rifles tués au combat). On y trouve un petit café, de quoi pique-niquer et un étonnant musée avec quelques pièces assez inattendues dans un tel contexte.
Etape N°4 : le Mémorial de Thiepval
Peut-être le plus connu de tous les mémoriaux samariens : en tout cas le plus monumental, le plus emblématique. Cet édifice franco-britannique, reconnaissable entre tous à son architecture avec les arches comme empilées. On y trouve gravés les noms des 72 244 soldats britanniques et sud-africains disparus sur les champs de bataille de la Somme de juillet 1915 à mars 1918. Il est dit que plus de dix millions de briques ont été nécessaires à sa construction !
A l’entrée du site, deux endroits différents : le Centre d’accueil et d’interprétation ainsi que le Musée 14-18 Bataille de la Somme. Une visite complémentaire pas forcément obligatoire mais enrichissante, qui permet d’approfondir sa perception des lieux, avec notamment une fresque de 60 mètres dessinée par Joe Sacco ainsi que la reconstitution de l’avion de Guynemer.
Etape N°5 : le Cratère de la Boisselle
Un site aussi unique que circulaire, organisé autour d’un cratère de 90 mètres de diamètre et de 22 mètres de profondeur, résultant de l’explosion de 35 tonnes d’explosifs. On y déambule doucement, dans un décor pastoral qui jure presque avec la violence de jadis. Des panneaux, répartis avec sagacité, racontent des histoires, des destins, des chemins de vie. On apprend ce qu’il s’est passé ici, l’origine de l’explosion, les circonstances. Une visite atypique, gratuite et en plein air !
Etape N°6 : le Musée Somme 1916
Place à l’urbain, du côté d’Albert, avec le Musée Somme 1916. Ici, la visite se veut souterraine, dans un ancien souterrain datant du XIIIème siècle (et reconverti en abri aérien en 1938). La visite, très intéressante, couvre de nombreux domaines de la WW1, en mettant notamment l’accent sur la la vie des soldats dans les tranchées lors de l’offensive du 1er juillet 1916. On y trouve également des reconstitutions de scènes, pour mettre des images sur les mots ! Mention spéciale à la Galerie des Héros (ouverte en 2011) pour la mise en lumière des personnages (que l’on retrouve de par ailleurs dans les rues de la ville).
Etape N°7 : le centre Sir John Monash
Attention : site exceptionnel encore une fois (et peut-être notre plus grand coup de cœur sur la thématique). Le centre Sir John Monash est unique en son genre. Déjà, il est moderne, ayant été ouvert en avril 2018. Ensuite, de par sa thématique : il est consacré aux soldats australiens et néozélandais venus se battre dans la Somme. Et enfin, il est ultra-méga-super bien foutu : pédagogique, accessible, enrichissant. Et gratuit (oui, oui).
Bref, en famille, c’est juste à ne pas rater (et vous pouvez également visiter le Mémorial adjacent).
Etape N°8 : la nécropole militaire du cimetière ancien Saint Acheul
Situé un peu en retrait des circuits touristiques classiques, un cimetière où les croix s’alignent. Ici reposent 2739 soldats décédés dans les hôpitaux militaires d’Amiens. On trouve aussi trois carrés (un musulman, un belge et un britannique) ainsi qu’une tombe russe. Le monument aux morts est l’oeuvre d’un artiste local de renom, Albert Roze.
Et après ?
Une fois le circuit terminé, beaucoup de choses sont possibles : rester en ville pour découvrir Amiens en famille ou continuer vos promenades samariennes. La Somme et les Hauts-de-France sont, en effet, un terrain de jeux idéal pour occuper tout le monde : depuis une trilogie de châteaux jusqu’aux vallées du Ternois en passant par les remparts de Montreuil-sur-Mer ou une douce et bucolique promenade la long de la Coulée Verte...
Cinq raisons de visiter les sites de mémoire en famille
Parce que cela vaut le coup !
Blague à part, c’est une question légitime : pourquoi, en effet, passer une journée à se balader aux quatre coins de la Somme pour explorer les sites de mémoire en famille ?
1) Parce qu’il ne faut pas oublier.
Avec le décès du dernier Poilu, Lazare Ponticelli, en mars 2008 (à l’âge de 110 ans !), il ne reste plus aucune personne pour témoigner de vive voix de ce que fût réellement la Première guerre mondiale. Alors, certes, il reste les livres, photos et récits mais c’est en allant là où cela s’est passé que l’on peut se rendre compte – dans une certaine mesure – pour mieux comprendre, englober et marquer.
2) Parce que beaucoup de sites sont en extérieur.
Oubliez les musées poussiéreux et les recoins obscurs : les sites de mémoire de la Somme se visitent, se vivent en extérieur, les yeux grands ouverts et en n’importe quelle saison. Faire ce circuit d’un lieu vers un autre est également une belle façon de découvrir la nature samarienne sous différentes coutures, depuis différents points de vue !
3) Parce que les enfants vont aimer !
Testés et validés par Fils (7 ans et demi) et Ado (14 ans) : les sites de mémoire ont su se renouveler, être attractifs, ludiques, pédagogiques. Vraiment !
4) Parce que c’est un voyage dans le voyage.
De l’Irlande à l’Afrique du Sud, de la Somme au Canada, du Commonwealth à l’Australie, les sites de mémoire montrent et démontrent l’ampleur mondiale de 14-18. Se déplacer pour apprendre à quel point ces différents pays furent impliqués et payèrent un lourd tribut de sang sur le sol français, c’est aussi aller à la rencontre de destins, d’histoires tragiques mais également d’héroïsme, de fiertés. Et quel plaisir d’échanger avec les bénévoles internationaux présents à certains moments !
5) Parce que cela permet de découvrir la Somme.
Oui (et que la Somme, on ne la visite jamais assez).
Pour aller plus loin
Il existe beaucoup (mais vraiment beaucoup) de ressources sur les sites de mémoire de la Somme dont, notamment, le Circuit du Souvenir, qui va d’Albert à Péronne (et dont vous pouvez retrouver le récit par Sarah, la légendaire blogueuse qui échange des billets contre des sourires). Il y a également une véloroute qu’a parcouru, d’Arras à Amiens, une des Deux dames en Van.
Le réseau Somme Battlefied Partner est une autre ressource précieuse pour organiser un voyage sur la thématique de 14-18. Enfin, pour tout ce qui touche aux cimetières militaires, le CWGC (pour Commonwealth Wars Grave Commision) est une référence, notamment pour identifier des ancêtres disparus (et vous lancer dans une aventure généalogique).
Et sinon, vous avez aussi la possibilité d’une visite guidée depuis Paris, à la journée. N’hésitez pas à utiliser le widget dédié pour la réserver : vous ne paierez pas plus cher (et je récupérerais quelques euros au passage).
Et pour finir, juste en passant !
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